Alexandra Boulat

Une semaine dans l’enfer de Gaza

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“Je travaille dans la région depuis les années 90.
Lorsque le Hamas a gagné les élections de cette année, les Palestiniens espéraient que leur situation économique et sociale allait s’améliorer, mais bien au contraire elle a empiré. Le bras de fer entre le Hamas, le Fatah, Israël et le reste du monde est en train de noyer la population de Gaza. Fin juin, après quatre mois d’embargo international, la situation économique était déjà mauvaise, mais lorsque les militants armés pro-Hamas ont enlevé un soldat israélien, l’armée israélienne a lancé une opération militaire de grande envergure dans la bande de Gaza.
Maintenant, prendre des photos à Gaza est devenu un combat. Le danger vient de différents côtés. D’un côté, les frappes aériennes israéliennes, les tireurs d’élite et les chars qui tirent ; de l’autre, outre une menace constante d’enlèvement, une guerre civile rampante, dont les Palestiniens ne sont pas fiers. Mais au final, le plus grand défi est de photographier la situation d’une manière qui ne soit pas redondante.
Les problèmes de Gaza ne sont pas nouveaux et le monde regarde des images de la misère palestinienne depuis si longtemps que même les images les plus violentes n’ont plus d’impact ni de sens. Même mes yeux sont parfois fatigués du drame palestinien, et c’est peut-être pour cela que je me laisse prendre par les détails. Comme le conflit et la douleur sont devenus ordinaires, même pour les Palestiniens eux-mêmes, mon intention est de regarder l’ordinaire aussi. La vie sans électricité, un réfrigérateur vide, une télévision sans images, dans la chambre d’une maison dont la construction ne sera peut-être jamais achevée. Des enfants portant des tee-shirts aux couleurs vives comme seul signe de bonheur, ou un gobelet en plastique contenant une rose solitaire dans une chambre d’hôpital….. Je ne cherche plus à avoir un impact direct, et à côté des funérailles et des destructions, je veux montrer la vie quotidienne des habitants de Gaza à travers leur environnement personnel.”
Alexandra Boulat